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18 janvier 2008 5 18 /01 /janvier /2008 02:30
Je n’ai rien contre le fait que l’anglais soit la langue internationale, le nouvel esperanto. Je préfère, même, avoir une langue pour la communication et une pour les sentiments. Une pour le business, une pour la réflexion.

Le monde s’étonne et s’agace de la volonté française de promouvoir sa langue et sa culture. Soit.

Mais allez dans les universités chinoises, et cette défense, cette promotion, paraîtra moins ridicule.

Dans la bibliothèque de langues étrangères, les trois-quarts des livres sont en langue anglaise, et les autres langues (à Fudan : le français, l’allemand, le russe, le japonais et le coréen) se partagent le dernier quart. Si le français se taille la meilleure part de ce quart, c’est surtout pace que les Allemands et les Autrichiens établissent des Centres germaniques, au sein des universités, avec leurs propres bouquins, autogérés et grassement approvisionnés.

Certains auteurs français ne peuvent être lus qu’en anglais, c’est assez dire.

Mais le problème est plus profond. Dans le département de français, un seul professeur est habilité à diriger des thèses de doctorat, et seulement en linguistique. Le département d’anglais en a beaucoup d’autres, dans plusieurs disciplines dont la littérature.

Les Chinois qui veulent étudier les littératures et les pensées étrangères ont donc tout intérêt à choisir l’anglais. Et cela, uniquement parce que l’anglais est devenu l’esperanto international, la langue du commerce.

C’est le paradoxe : une langue parlée de plus en plus, et de plus en plus mal, et pour des raisons extra littéraires, devient le véhicule de la pensée et de la sensibilité occidentales. Qu’on laisse l’anglais aux businessmen, d’accord, mais doit-on voir l’anglais comme seule langue intellectuelle ? Pourtant, la littérature française n’est pas inférieure à l’anglaise.

Et que dire de l’italienne, de l’espagnole ? Un institut de langues et littératures étrangères est-il crédible sans une forte section « romane » ?  C’est peut-être à nous de le créer, et d’abord de le vouloir, car les Chinois ont d’autres chats à fouetter.

« Nous », je veux dire les Français. Avec notre prétention à l’universalité, nous sommes peut-être les seuls qui pouvons résister : en nous unissant avec les autres pays francophones, puis avec nos grands voisins latins, nous pouvons encore imposer une présence européenne non anglo-saxonne dans les universités chinoises.  

 

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commentaires

D
Un peu de soleil pour rechauffer et encourager ses pairs, le site "Aujourd'hui la Chine" edite un article sur un professeur epatrie a Hong-Kong qui a reussi a completement redynamiser les etudes de francais dans son universite. Bravo!<br /> <br /> http://www.aujourdhuilachine.com/actualites-chine-un-francais-de-hong-kong-parmi-les-trophees-senat-5461.asp?1=1
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E
Un mois en France, j'avais presque oublié que l'internet est censuré en Chine. Et voila: over-blog ne peut plus être accédé (de là où je suis) qu'avec un outil de contournement. Il doit y avoir quelque part le blog d'un Chinois qui ne plait pas. Pour raccrocher au sujet principal, ce n'est pas comme ça que le gouvernement chinois fera avance la cause du chinois langue mondiale. <br /> <br /> Je viens de retrouver aussi Tushu Dasha, la grande librairie de Tianjin sur 5 étages. Un demi-étage pour les livres en anglais, la moitié étant du matériel pour apprendre l'anglais; le reste, c'est la littérature mondiale en anglais. Si je veux lire Montaigne, j'ai une belle édition en anglais sortie par les presses de la province de Hebei. Les livres en français sont dans la section d'apprentissage des langues. Pourtant, FLTRP (foreign language teaching and research press http://www.fltrp.com ) édite quelques oeuvres du domaine public, livre de poche à des prix chinois. Tchekov et Tolstoi en russe, mais apparemment pas grand-chose en français, c'est une branche annexe de sa production de livres d'enseignement. Quand même, les circuits existent, et il suffirait peut-être d'un petit encouragement officiel de la France pour que des livres récents arrivent en librairie. En attendant, j'ai rapporté dans mon sac quelques kilos de livres qu'on ne trouve pas ici. J'ai les lecteurs. Tout ça se nourrit l'un l'autre. Comme il faut passer par l'anglais pour accéder au français, on apprend l'anglais.
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G
A mon avis, le chinois deviendra le nouvel esperanto - ce que je ne lui souhaite pas - lorsque le système des caractères sera perçu comme plus pratique que les écritures à tendance phonétique. Et il supplantera l'anglais lorsque la Chine offrira un nouveau way of life, quand les Chinois inventeront une nouvelle culture, ce que je ne vois pas arriver dans un futur proche.<br /> Bravo denis pour ce commentaire! On ne dirait pas que tu as commencé le français il y a un peu plus d'un an. Impressionnant.
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M
et si on apprenait tous le chinois?
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O
Bonjour Guillaume,je suis Denis.Je suis a Canton maintenant.C'est vrai que l'anglais domine presque toutes les disciplines a Fudan,meme si les professeurs dans le departemant de la philosophie et la religion choisissent de apprendre "L'introduction a Coran" et "L'histoire chretienne" en anglais.C'est tres a la mode si on peut citer certains mots academiques en anglais en ecrivant une these en chinois. Et malheureusement je veux ajouter que non seulement des auteurs francais mais aussi ceux de l'Italie ou de l'Amerique Latine ne peuvent etre lus qu'en anglais.Mais, en meme temps,Guillaume,je te confirme que beaucoup beaucoup des etudiantes chinois a Fudan lisent les romans de Kundera ,Duras ,Calvino ou Borges en chinois.Lorsque nous ne pouvous pas maitriser la langue francaise ou italienne ou espanole bien(nous n'avons pas assez de temps), nous savons au moins que pour la raison de la diversite culturelle du monde, nous devons degouster la culture non-anglophone. Et c'est deja le cas.D'ailleurs,nombreux etudiants s'interessent a la culture "romane" et ils se sont renseignes sur internet ,mais c'est le temps qui  pose une limite formidable pour eux.
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