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11 août 2006 5 11 /08 /août /2006 07:23

Ce sont des détails qui montrent que nous sommes dans une autre Chine. Dès l’aube, les gens fréquentent la rivière. Les enfants s’amusent et nagent, les femmes se lavent les cheveux, d’autres femmes lavent leur linge ou leurs aliments. Les bateaux passent à cinquante mètres du bord. Des hommes se brossent les dents. Des corps bronzés font leur vie au bord de l’eau, avec les montagnes en pain de sucre, les buffles qui paissent dans une végétation éclatante sur la rive opposée. Le voyageur n’a pas l’habitude de ce spectacle dans la Chine des Han. Ici, l’ethnie majoritaire sont les Zhuang. Ils ont perdu leur langue mais leur culture quotidienne reste attachée à l’Asie du Sud Est.

Les baignades du soir sont le plaisir suprême, la clôture idéale d’une journée de travail. Le jeune Chinois qui nous collait aux basques, le premier jour, vint un jour me voir au bord de la rivière. « Je t’ai amené la manager de l’hôtel. Tu m’as dit que tu la trouvais jolie, alors elle est venue ce soir. Mais elle ne sait pas nager. Tu dois lui apprendre. »

Une jolie jeune femme, en effet, grassouillette, engoncée dans son gilet de sauvetage, m’attendait pour une leçon de natation. Tout le monde se mit à lui donner des conseils contradictoires. J’attendais que le monde se fatigue et se désintéresse d’elle pour commencer mon travail. Je lui appris à bouger les jambes à la manière d’une grenouille, à faire la brasse avec les bras, à coordonner les mouvements, et ne la lâchais pas. Les locaux regardaient ce couple mixte qui se touchait dans l’eau avec application. Difficile de lire ce qu’il y avait dans leurs yeux. Révolte, envie, divertissement, mépris, curiosité. L’eau annulait toute différence entre cette femme et moi. Nous ne nous étions jamais parlé, et, en dix minutes, l’eau nous avait réunis, avait fait de nos corps glissants des compagnons riants et fluides.

Le fleuve, le vaste fleuve, console nos labeurs.

La baignade terminée, la manager nous invita à un grand repas à son hôtel, préparé par le jeune factotum débrouillard.

Tous les soirs qui suivirent, je me transformais en maître-nageur pour ma belle manager aux longs cheveux lisses. Elle s’améliorait tous les jours et était presque capable de se débrouiller seule quand je partis pour d’autres horizons.

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